Contrer le désentraînement après une commotion cérébrale

Contrer le désentraînement après une commotion cérébrale

Pour les athlètes de tous les niveaux, la réussite sportive est le résultat d’années de pratique et d’entraînement intensif. Le repos forcé causé par l’arrêt soudain de l’entraînement à la suite d’une blessure sportive, comme une commotion cérébrale, pourrait compromettre ces années d’efforts et l’atteinte d’un rêve sportif. Cependant, il n’est pas obligatoire d’en être ainsi. Avec un plan d’intervention spécialisé et adapté à la convalescence de l’athlète, il est possible d’assurer sa sécurité, sans compromettre totalement ses aptitudes et ses performances sportives et ainsi minimiser les effets du désentraînement.

Le « syndrome » du désentraînement

Le désentraînement est défini comme étant une « perte partielle ou totale des adaptations liées à l’entraînement à la suite de l’arrêt de l’entraînement ». Ce phénomène survient entre autres lorsqu’une blessure force l’athlète à arrêter son entraînement pour une longue période de temps.

En plus de devoir compléter sa réadaptation, l’athlète doit lutter contre la perte de ses capacités physiques.  En tant qu’intervenant dans le milieu sportif, l’encadrement et le soutien de l’athlète durant cette période devient une responsabilité importante et peut poser plusieurs défis qui varient d’une blessure à l’autre. Dans le cas des commotions cérébrales, ce défi est encore plus important puisque la récupération peut prendre plusieurs semaines. Il s’agit donc d’un aspect à ne pas négliger!

Allier sécurité et performance après une commotion cérébrale

À l’Institut des commotions cérébrales, nous croyons qu’une approche interdisciplinaire tenant compte des trois aspects suivants est essentielle pour contrer les effets du désentraînement après une commotion cérébrale:

  • l’aspect émotionnel
  • l’aspect mental
  • l’aspect physique

Cette approche peut être mise en place aussitôt que la période de repos est complétée.

 

  1. L’aspect émotionnel

L’état émotionnel de l’athlète jouera un rôle significatif dans sa récupération après une blessure, et encore plus dans le cas d’une commotion cérébrale. L’angoisse de perdre ses acquis, le mal-être profond de ne pas pouvoir bouger ni de se dépasser, ainsi que la peur de ne pas revenir comme avant sont  des préoccupations pouvant nuire à la  récupération. Ainsi, cela démontre l’importance de prendre les moyens nécessaires afin d’assurer l’équilibre émotionnel de l’athlète tout au long du processus.

Le soutien des entraîneurs, des coéquipiers, de la famille et des amis est donc essentiel à la récupération. L’athlète doit se sentir confortable de parler de sa situation sans être jugé par son entourage. L’aspect émotionnel doit donc être pris en considération par tous les professionnels de la santé impliqués dans la prise en charge de l’athlète. De plus, l’aide d’un psychologue peut être nécessaire dans certaines situations. Par exemple, dans le cas d’un syndrome post-commotionnel, l’aspect émotif peut devenir l’obstacle important à la récupération.

 

  1. L’aspect mental

L’objectif d’une intervention visant l’aspect mental est d’entretenir les gestes techniques et de conserver les capacités motrices. Pour y arriver, des techniques d’imagerie mentale comme la visualisation interne et externe peuvent être employées. L’imagerie mentale est définie comme étant «une répétition symbolique d’une action ou d’un mouvement sans bouger la moindre partie de son corps.»

Puisque l’imagerie est une habileté qui doit être apprise et travaillée, l’athlète doit déjà posséder une certaine expérience de cette technique afin que ce type d’intervention soit efficace. Ce n’est pas le temps d’apprendre une nouvelle habileté lorsque nous sommes aux prises avec des symptômes d’une commotion cérébrale! Habituellement, le psychologue sportif de l’équipe prendra cet aspect en charge.

 

  1. L’aspect physique

Les techniques utilisées pour contrer les pertes physiques liées au désentraînement dépendront de plusieurs facteurs. Pour cette raison, l’athlète devrait être référé à un kinésiologue spécialisé dans la prise en charge des commotions cérébrales.

 

Tout d’abord, le plan d’intervention peut inclure des étirements et de la mobilisation passive, permettant de maintenir la mémoire musculaire. Tout dépendant de la condition de l’athlète, l’électrostimulation pourrait s’avérer intéressante. Toutefois, cette méthode n’a pas encore été validée dans la littérature scientifique des commotions cérébrales. Cette approche est déjà utilisée pour ralentir l’atrophie musculaire d’une partie du corps immobilisée dans le plâtre. Le but est de stimuler les fibres nerveuses entourant les muscles, ce qui provoque la contraction musculaire, comme le ferait le cerveau lors d’une contraction volontaire.

Finalement, l’aspect physique devrait comprendre un protocole sous-maximal d’activité physique. Tel que démontré par plusieurs études, l’exercice après une commotion cérébrale est bénéfique lorsqu’elle est encadrée par un professionnel. L’utilisation de la musculation dans le cadre d’une réadaptation suite à une commotion cérébrale est peu documentée présentement. Par contre, un kinésiologue spécialisé dans la prise en charge des commotions cérébrales sera en mesure d’élaborer et de superviser un programme d’entraînement cardiovasculaire et musculaire sécuritaire, afin de favoriser la récupération et contrer le désentraînement.

Le plan d’action

Lorsqu’un athlète, professionnel ou récréatif, subit une commotion cérébrale, le plan d’action  visant à contrer le désentraînement doit :

  1. Être individualisé et adapté aux besoins ;
  2. Prendre en compte:
    • les facteurs qui déclenchent ou augmentent les symptômes;
    • le temps écoulé depuis la commotion;
    • la condition physique initiale de l’athlète;
  3. Inclure différents professionnels de la santé ayant une expertise en commotion cérébrale:
    • médecin
    • kinésiologue
    • psychologue sportif
    • physiothérapeute
    • thérapeute du sport
    • etc.

Le désentraînement après une commotion cérébrale ne pourra malheureusement pas être  complétement évité. Cependant, en élaborant un plan d’intervention efficace qui tient compte des trois aspects présentés plus haut, il est possible de minimiser les effets négatifs et de permettre à l’athlète de retourner au jeu le plus rapidement possible et de façon sécuritaire.

 

 

Références

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